Journée d’étude L’entreprise coopérative depuis Godin : une alternative à l’entreprise capitaliste ? La création au milieu du XIXe siècle par Jean-Baptiste Godin du familistère de Guise dans l’Oise constitue l’une des expérimentations les plus marquantes, en France, d’une entreprise de type différent, inspirée à la fois par Charles Fourier et par le mouvement coopératif. Ancien ouvrier passé manufacturier grâce à son inventivité dans les poêles à charbon en fonte, Godin incarne la figure d’un capitaine d’industrie qui entend changer le rapport entre capital et travail et par là même sortir la classe ouvrière de la pauvreté. Il tente ainsi de répartir autrement les bénéfices dégagés par l’entreprise, d’organiser des groupes affinitaires, de mettre en œuvre une première forme de démocratie industrielle via le recours aux votes. Son histoire peut être lue, comme le suggère Michel Lallement dans un ouvrage publié en 2009, comme la tentative de rendre concrète l’utopie d’un autre rapport au travail. Pour autant, cette expérience n’en oscille pas moins entre une forme de paternalisme et une rationalisation progressive de l’organisation du travail liée à la concurrence dans le monde industriel.
Cette journée d’étude, née d’une initiative commune au Centre Max Weber (Michèle Dupré) et au Laboratoire Triangle (Sophie Béroud, Hervé Joly), part de la discussion du livre de Michel Lallement avant élargir le questionnement sur la réalité contemporaine du mouvement coopératif. Elle s’interroge sur la capacité de celui-ci à proposer un autre mode de gouvernement d’entreprise, fondé sur davantage de participation des salariés et sur une répartition plus égalitaire des bénéfices. La discussion est ancrée dans une approche socio-historique et pluridisciplinaire, en faisant dialoguer histoire et sociologie et en interrogeant le présent du mouvement coopératif à la lumière des conceptions et des expériences passées. Pour ce faire, deux autres chercheurs interviennent : d’une part, Jacques Prades, économiste, qui a notamment travaillé sur l’expérience de Mondragón au Pays Basque espagnol, mais aussi sur le mouvement coopératif à Trente en Italie et, d’autre part, Maxime Quijoux, sociologue, auteur d’une thèse sur les usines « récupérées » en Argentine dans le contexte de la crise des années 2000 et actuellement engagé dans un projet de recherche sur les sociétés coopératives et participatives (SCOP) en France.